En mai 2012, nous étions sept étudiants, sept aventuriers téméraires à nous engager dans un périple dont personne ne connaissait l’aboutissement… En route vers la mer intérieure de Seto ! Objectif final : Manabeshima (真鍋島), littéralement l’île du « pot authentique » (???)… Peu importe le nom, on y va ! Notre itinéraire est retracé sur la carte figurant ci dessous (cliquez pour agrandir).
Concrètement, la mer intérieure de Seto, c’est l’étendue d’eau qui se situe entre trois des quatre principales île de l’archipel japonais : Honshu, Shikoku, et Kyushu. Elle est parsemée d’une multitude de petites îles dont certaines sont relativement connues, comme l’île-musée de Naoshima, et d’autres sont complètement inconnues, comme notre destination, Manabeshima…
Mais pourquoi sommes-nous donc partis sur cette île a priori sans intérêt dont la majorité des japonais eux-mêmes ignorent l’existence ? La raison à tout cela, le point de départ, c’est un livre : Manabé Shima, de Florent Chavouet (voir la couverture à droite). Il s’agit d’une bande dessinée très bien réalisée et pleine d’humour, décrivant le séjour de l’auteur, un jeune Français, sur cette île recluse au milieu de nulle part. Il s’agit d’un deuxième tome pour Florent Chavouet, le premier ayant pour décor la capitale nippone. Je vous recommande d’ailleurs fortement de consulter son site personnel et son blog.
C’est donc après avoir lu cette bande dessinée que nous avons décidé d’explorer l’île par nous-mêmes, afin de vérifier si la description était bien fidèle… Et nous n’avons pas été déçus ! Dés notre arrivée sur l’île, c’était comme si nous avions été aspirés dans la bande dessinée. La plupart des habitants sont décrits dans l’ouvrage, ainsi que tous les lieux « clés » de l’île. Il était alors amusant de comparer chaque élément du livre à son original. Dés notre débarquement, c’est un des personnages principaux du livre qui nous a accueilli : Ikkyu-san. Je vous laisse voir par vous-mêmes…
C’était donc principalement motivés par ce livre que nous sommes partis vers la mer intérieure de Seto. Un voyage de cinq jours et quatre nuits. La première étape consistait à rejoindre la ville d’Okayama, un trajet d’environ 9 heures en bus de nuit, direct depuis la capitale. De là nous avons rejoint la ville de Kasaoka en train, d’où nous avons directement appelé un bateau-taxi pour rejoindre Manabeshima. Nous avons campé deux nuits dans un parc public, visité l’île dans ses moindres recoins et sympathisé avec les habitants en prenant part à divers événements tels que l’Undokai (運動会) de l’école primaire, fête sportive traditionnellement tenue en mai ou en octobre dans toute école japonaise (sujet sur lequel j’avais d’ailleurs publié un précédent article). Satisfaits de la réalité de l’île, nous avons ensuite décidé d’explorer les terres voisines : Shiraijishima puis Kitagishima.
Nous avons sur cette dernière retrouvé un vieil homme qui nous avait été présenté à Manabeshima, Nakamura-san. Un exemple d’hospitalité comme on n’en fait que dans les campagnes japonaises. Non seulement nous a-t-il offert une de ces deux maisons pour y passer la nuit (!), mais il a en plus cuisiné deux repas pour nous, nous a fait visité l’île à bord de sa petite voiture et nous a même reconduit au port pour notre départ ! La maison elle-même était une sorte de caverne d’Ali Baba, remplie de vieilleries chinées dans des brocantes, une ambiance assez surréaliste et amusante.
Si vous faites un tour à Kitagishima, n’hésitez pas à contacter Nakamura-san, il se fera un plaisir de vous accueillir comme il semble d’ailleurs le faire à chaque fois qu’un groupe d’étrangers est aperçu dans la région. Un de ses amis tient d’ailleurs un blog comportant de nombreuses photos de ces invités improvisés. Vous trouverez même un article sur notre passage !
L’île de Kitagishima était par le passé réputée dans le Japon entier pour sa production de pierres, utilisées dans les constructions les plus nobles du pays, telles que le temple de Meiji-Jingu à Tokyo par exemple. Depuis quelques décennies, avec l’arrivée des pierres chinoises sur le marché, Kitagishima a perdu sa compétitivité et l’île s’est peu à peu désertifiée. Auparavant peuplée d’environ 1200 personnes, il ne reste aujourd’hui qu’une fraction de la population, environs 200 âmes. L’école primaire, un bâtiment imposant sur 3 étages, n’accueille désormais qu’une poignée d’enfants, au total moins de 10. Ce phénomène de désertification est commun à la plupart des îles de la mer intérieure de Seto, ayant perdu toute activité économique et par la même occasion tout attrait pour les jeunes générations. Nous avons pourtant fait à Kitagishima la rencontre inopportune d’un trentenaire Néozélandais, arrivé là directement en bateau il y a quelques années et depuis lors installé sur l’île. Il a monté son entreprise spécialisée dans les équipements nautiques, et notamment les cordages. L’entreprise emploie plusieurs personnes résidant sur l’île et possède même un site web très complet.
Pour notre dernière journée dans la région, nous avons décidé d’explorer une autre île, un peu plus éloignée de Manabeshima cette fois-ci : Shodoshima. Il s’agit d’une île de taille conséquente et équipée de nombreuses infrastructures, rien à voir avec notre première destination. Pour nous y rendre, il a été nécessaire de rejoindre Okayama afin de prendre un nouveau ferry. Nous ne sommes restés que quelques heures sur cette île, avant de monter dans le bus de nuit qui nous reconduit à Tokyo. Juste le temps de nous rendre à la presqu’île, apparemment connue, de Shodoshima. Parfois comparée au Mont Saint-Michel (??) ce n’est en fait qu’une simple presqu’île… Mais le couché de soleil était agréable !